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Le Rapport Stora et les massacres du 8 mai 1945. Impasse sur un génocide

Et si jamais l’histoire de la révolution est refaite, la réécrira-t-on de la même manière? Un fait tangible. L’histoire de la guerre d’Algérie souffre le martyrs à cause de l’approche subjective et sélective dans son écriture ou des «préconisations» de ses faits par d’obscurs illuminés. Parmi les faits troublants ou génocides gravés dans les têtes de générations entières en Algérie, ceux commis par la France coloniale. Il s’agit indéniablement des massacres du 8 mai 1945. Une impasse sur ce génocide? La réalité sur la tragédie suscitée par les massacres perpétrés volontairement et sans distinction par la horde militaire coloniale contre de paisibles civils algériens à Guelma Sétif et Kherrata le 8 mai 1945, est incommensurable et dont les faits liés aux tortures et tueries infligées aux manifestants algériens pour la liberté de leur pays, sont aussi accablants que démesurés à la fois. On ne cessera de le dire et redire, des «pans» jusqu’ici enfouis ou «tus» sur notre glorieuse révolution doivent être aujourd’hui mis au grand jour. L’histoire ne pardonne pas tant il y va de l’avenir identitaire nationaliste algérien novembriste. Encore une fois, le rapport Stora sur la guerre d’Algérie est mis à l’index. Cette fois, c’est l’historien Mohamed Ould Si Kaddour El Korso qui rebondi et choisi le moment de la célébration des massacres du 8 mai pour apporter certains éclairages au motif qui a fait l’impasse sur les massacres du 8 mai 45. Le rapport Stora sur la Guerre de libération nationale de l’historien français, Benjamin Stora, a « fait l’impasse » sur les massacres du 8 mai 1945, a en effet déploré l’historien Mohammed Ould si Kaddour El-Korso, qualifiant ce sanglant épisode de « génocide ». « Ce génocide, qui ne dit pas son nom et tel que perçu par les Algériens, ne trouve même pas sa place dans les fameuses «préconisations» de Benjamin Stora dans son rapport sur la Guerre d’Algérie. Des impasses y ont été faites sur nombre de questions dont celle du 8 mai 1945 », a déclaré M. El-Korso à l’occasion de la commémoration du 76ème anniversaire de ces tragiques événements. Il relève, à ce propos, une « approche sélective quant aux méfaits de la colonisation », déplorant également que le document « privilégie, entre autres questions, celle du déplacement des harkis et de leurs enfants entre la France et l’Algérie, des enlèvements et assassinats d’Européens en 1962 à Oran, ou encore la préservation des cimetières européens et juifs en Algérie ». En revanche, fait observer M. El-Korso, le tragique épisode dont a été le théâtre de nombreuses villes algériennes en 1945, a été évoqué uniquement à travers le rappel des déclarations des ambassadeurs français en Algérie, Hubert Colin de Verdière (2005) et Bernard Bajolet (2008). Lesquelles ont été suivies, en 2012, de celle du président François Hollande. Pour l’interlocuteur, le « rapporteur Stora et le président Macron sont dans leur rôle », rappelant que « même le président François Mitterrand a eu recours aux amnisties des généraux factieux alors que ses successeurs se sont distingués par la pratique politique du silence, des dérobades, des esquives et des demies vérités. Le tout, au nom de la sacro-sainte «raison d’Etat». Revenant sur les faits en question, le spécialiste en histoire précise que ces derniers « prouvent, en premier lieu, la ferme détermination de notre peuple à opérer une rupture radicale avec le colonialisme ». En second lieu, poursuit-il, « la détermination de ce même colonialisme à imposer sa loi en dépit des promesses des Alliés aux Algériens, d’un discours alambiqué de De Gaulle en 1944 ainsi que les sacrifices des nôtres pour la libération de cette même France », regrettant que « les sacrifices des colonisés n’ont de valeur que lorsqu’ils servent la cause du colonisateur ». Abordant l’épineuse question de « l’exactitude » du nombre des victimes algériennes des massacres du 8 mai 1945, Mr El-Korso a fait état d' »approximations variant d’une source à une autre, selon que le rapporteur se situe dans l’un ou l’autre camp, qu’il soit acteur ou simple observateur ». Ceci, sachant que « les auteurs de ces faits ont vite fait de faire disparaître les traces des horreurs qu’ils venaient de commettre ». « Minimiser les pertes humaines fait partie du registre de celui qui en est l’auteur et le moyen de se faire une idée de ce génocide est d’ouvrir en urgence les charniers et fosses communes pour les questionner », commente-t-il, assurant, à ce propos, que « les archives françaises regorgent de documents relatant le déroulé des massacres » et insistant pour « l’ouverture d’abord » des fonds se trouvant en Algérie. « Mais au-delà des chiffres, il y a lieu d’évoquer la reconduction par la France coloniale des pratiques barbares auxquelles le nazisme a soumis les Français », renchérit l’historien, faisant part du témoignage qu’il a collecté auprès d’un rescapé de Kherrata, ayant assisté au « crime abominable d’un bébé arraché au sein de sa mère pour être abattu de plusieurs balles dans la tête ». De même que celui d’un autre témoin, originaire de Guelma, qui lui avait confié « ne pas pouvoir se défaire, à ce jour, de l’odeur insupportable de la chaire humaine qui se dégageait de Kef El Boumba ». Interpellé, enfin, sur la « disposition de la France à reconnaître tous ses crimes coloniaux en Algérie », M. El-Korso appréhende cette question « avec tous ses pendants » que sont, outre les massacres du 8 mai, la criminalisation, l’indemnisation, l’ouverture de toutes les archives françaises, les enfumades, les déportés, les corvées de bois, les camps, le nucléaire, la torture, le génocide, l’ethnocide…etc. Et de convier les Algériens à mener « le combat » dans ce sens: « Il s’agit d’une mission à accomplir au quotidien et pas seulement lors des commémorations. Elle nécessite une mobilisation des compétences intellectuelles, des approches pluridisciplinaires, une volonté politique effective mais surtout une démarche politique d’Etat à Etat ».

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