Brut en hausse, crise vénézuélienne

La hausse des prix du pétrole observée en début de semaine illustre la sensibilité persistante du marché pétrolier aux tensions géopolitiques, en particulier après l’intensification de l’intervention américaine dans les Caraïbes contre des pétroliers liés au Venezuela. L’annonce de l’interception – ou de la poursuite – de plusieurs navires, soupçonnés de transporter du brut vénézuélien sous sanctions, a ravivé les craintes de perturbations de l’approvisionnement mondial, provoquant un rebond des cours après deux semaines consécutives de baisse. Le Brent est ainsi repassé au-dessus de 60 dollars le baril, tandis que le WTI s’est rapproché de 57 dollars. Selon June Goh, analyste principale chez Sparta Commodités, «le marché prend conscience du fait que l’administration Trump adopte une approche intransigeante envers le commerce du pétrole vénézuélien». Même si le brut vénézuélien ne représente qu’environ 1% de l’offre mondiale, ces actions renforcent une prime de risque géopolitique déjà alimentée par la guerre en Ukraine et les tensions persistantes entre la Russie et l’Occident. Dans ce contexte, Tony Sycamore, analyste chez IG, estime que «le rebond des prix a été provoqué par l’annonce d’un blocus total des pétroliers vénézuéliens sanctionnés», combinée à des incidents touchant la flotte pétrolière russe. Le marché reste toutefois structurellement baissier à moyen terme. Les investisseurs demeurent préoccupés par les perspectives d’excédent d’offre en 2026, liées notamment à un éventuel retour de volumes russes sur le marché en cas d’avancées diplomatiques sur le conflit ukrainien. Les déclarations prudentes de responsables russes, qui jugent insuffisantes les propositions de paix actuelles, entretiennent néanmoins l’incertitude. Au-delà de l’impact immédiat sur les prix, la stratégie américaine, vis-à-vis du Venezuela, soulève des enjeux plus larges. Pour Juan Szabo, consultant et ancien dirigeant de PDVSA, la politique de blocus reste «vague» et pourrait dissuader armateurs et assureurs, renchérissant les coûts de fret et réduisant les exportations. De son côté, le chercheur Yvan Cliche souligne que «la domination énergétique» est devenue un pilier central de la politique étrangère américaine, le Venezuela représentant une cible stratégique majeure en raison de ses immenses réserves. À court terme, le marché pétrolier devrait rester volatil, tiraillé entre des fondamentaux d’offre abondante et une géopolitique capable, au moindre incident, de raviver les tensions sur les prix.


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