Face aux cas de détournement de l'allocation touristique. La Banque d’Algérie durcit les conditions

Après des mois d’attente et de spéculations, la Banque d’Algérie se décide finalement : fallait-il changer les règles? Qui peut désormais en bénéficier ? Et pourquoi faut–il contrôler les bénéficiaires? Et bien sachez que pour obtenir ce montant de 750 euros, le voyage devra durer au moins sept (7) jours sous peine de se voir restituer l’intégralité des devises perçues. Une sacrée «réforme» qui permet d’économiser les devises étrangères de manière à les mettre à l’abri des «tentacules» des marchés parallèles. Les changeurs et les «faux voyageurs» en sont avertis. Ils peuvent en cas de dépassement de ce genre s’exposer à de lourdes sanctions. Les conditions et les modalités d’obtention de l’allocation touristique sont désormais durcies. Elle a imposé de nouvelles règles pour l’octroi du fameux droit de change équivalent à 750 euros aux voyageurs algériens. Dans une instruction datée de 15 décembre, le régulateur a rappelé aux banques algériennes les modalités d’octroi de ce régime de change. La Banque d’Algérie serre donc la vis. Dorénavant, n’est pas bénéficiaire de cette allocation qui veut. L’allocation touristique, applicable à partir de 20 juillet 2025, sera durcie. Portée à 750 euros pour les adultes depuis l’été dernier, elle ne s’obtiendra plus désormais aussi facilement qu’on pourrait le croire. L’Etat a décidé d’accentuer sa lutte contre les abus en matière d’octroi illégitime de cette allocation, tout comme il l’avait fait d’ailleurs pour l’allocation de chômage. Devant les convoitises et les détournements vers le marché parallèle, la Banque d’Algérie réagit fermement et consolide officiellement les conditions d’accès au droit de change pour voyage à l’étranger. Une note adressée aux banques vient en effet de préciser de nouvelles obligations strictes, avec un mot d’ordre clair, contrôle renforcé, traçabilité totale et fin des pratiques tolérées jusqu’ici. Fin du cash et compte bancaire exigé, cette allocation allouée auparavant, avec une facilité déconcertante et à tout venant, se durcit donc pour les adultes. Derrière ces «réajustements», c’est toute la mécanique de l’allocation touristique qui se trouve encadrée de manière plus rigoureuse. Cela survient dans un contexte marqué par des affaires judiciaires et des réseaux organisés ayant exploité ce dispositif, rapporte le journal électronique «Algérie 360». La Banque d’Algérie s’appuie dans sa note sur l’instruction N°05-2025 du 17 juillet 2025 relative au droit de change pour voyage à l’étranger. L’objectif affiché consiste à «préciser les modalités de mise en œuvre des conditions d’octroi dudit droit», tout en rappelant aux banques leur rôle central dans le contrôle des bénéficiaires. La banque centrale insiste sur l’obligation d’appliquer strictement les dispositions légales et réglementaires en vigueur. Les établissements bancaires doivent, ce faisant, se monter vigilants. Ils doivent vérifier, contrôler et s’assurer que «les capacités financières du bénéficiaire effectif lui permettent de s’acquitter du montant afférent à l’opération pour son propre compte et ou au profit des personnes apparentées», telles que définies par l’instruction. C’est dans la perspective de préserver les sources de l’économie nationale et la lutte contre les changes informels sur le marché noir des devises que l’Etat a opté pour cette démarche. Fini en effet le temps des «vaches laitières» tant cette nouvelle exigence s’inscrit dans une logique de cohérence entre le profil du client et l’opération demandée et ce, afin de limiter les demandes fictives ou les montages destinés à contourner la réglementation. Ce nouveau procédé est perçu comme un changement majeur. Le demandeur doit donc disposer d’un compte bancaire pour l’obtenir. La Banque d’Algérie précise que «l’octroi de ce droit de change est désormais subordonné à la détention par le demandeur d’un compte bancaire ouvert auprès de la banque domiciliataire». Les banques sont ainsi tenues de renforcer les mesures de vigilance, notamment la connaissance approfondie du client, la vérification de l’identité et l’évaluation de la cohérence des opérations avec le profil financier du titulaire. Cette mesure vise à réduire l’anonymat et à mieux tracer les flux liés à l’allocation touristique, en rendant plus difficile toute utilisation détournée du dispositif. Autre durcissement notable, la suppression totale des paiements en espèces. La Banque d’Algérie tranche sans ambiguïté sur ce point. «Le règlement de la contre-valeur en dinars du montant en devises doit être effectué exclusivement par des moyens scripturaux émis par les banques», précise la note. Sont autorisés, la carte CIB, le chèque bancaire ou tout autre instrument scriptural reconnu. Les paiements en liquide ne sont plus admis. Ce choix marque un tournant dans la gestion de l’allocation touristique. La Banque d’Algérie rappelle une règle souvent contournée ces derniers mois, la durée minimale de séjour à l’étranger. Les bénéficiaires ayant séjourné moins de sept jours hors du territoire national doivent restituer le montant perçu. À défaut, ils s’exposent à une sanction lourde : la perte du droit de change pour une durée de cinq ans, «sans préjudice de poursuites judiciaires». Les banques doivent informer systématiquement les bénéficiaires de cette obligation. Enfin, cette disposition s’inscrit dans la volonté de mettre fin aux voyages de complaisance. Organisés uniquement pour capter les 750 euros au taux officiel. Le ministre de l’Intérieur et des Transports, Saïd Sayoud, a révélé l’existence d’une fraude organisée autour de l’allocation de voyage accordée par l’État aux citoyens algériens. Devant l’APN, le ministre a indiqué que ce dispositif social, initialement destiné à faciliter les déplacements des citoyens à l’étranger, a été détourné de sa vocation par des réseaux illégaux, impliquant des intermédiaires et certaines agences de voyages. Selon le ministre, cette allocation «s’est transformée d’un avantage en un véritable problème en raison de pratiques frauduleuses systématiques». Ces dérives ont contraint les autorités à instaurer des restrictions temporaires au niveau des postes frontaliers afin de limiter l’ampleur du phénomène et d’endiguer les pertes en devises. Saïd Sayoud a expliqué que le gouvernement a procédé à une évaluation approfondie de la situation en coordination avec les autorités tunisiennes, à l’occasion d’une visite officielle effectuée récemment aux côtés du Premier ministre. Cette enquête conjointe a permis de mettre au jour l’implication de certaines agences de voyages dans l’organisation de déplacements suspects de citoyens algériens, reposant sur des méthodes frauduleuses visant principalement à capter la devise étrangère. Le mode opératoire identifié est relativement simple, mais particulièrement efficace. Des citoyens algériens sont introduits légalement en Tunisie, leurs passeports sont tamponnés, puis ils sont rapidement reconduits vers l’Algérie par des postes frontaliers surveillés, sans respecter la durée légale de séjour. Les mêmes personnes sont ensuite réintroduites de nouveau afin de répéter l’opération et de bénéficier plusieurs fois de l’allocation de voyage. Les chiffres avancés par le ministre sont qualifiés d’«alarmants». Près de 100.000 cas auraient été recensés en l’espace d’un mois et demi seulement. La majorité des personnes impliquées seraient des chômeurs, utilisés par ces réseaux comme instruments d’une fraude transfrontalière bien organisée.


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