Selon les estimations officielles, plus de 87 000 divorces ont été enregistrés en 2024, et 91 402 en 2023. Un chiffre alarmant. Toutefois, le taux de divorce a grimpé de 20,9 % en 2019 à 33,5 % en 2023 au total un mariage sur trois peut survivre. Pour la durée des mariages, on note trois mariages sur quatre qui se rompent dans les trois premières années de cette union. L'Algérie est considéré comme un des pays africains les plus touchés, avec un taux de séparation d'environ 33,5 % des mariages, soulignant une mutation sociétale profonde entre tradition et modernité, et l'importance du khol3 (divorce à l'initiative de la femme). Pour en connaître plus sur ce phénomène sociétal qui prend de l'ampleur dans notre société, nous avons joint Me Djamel Benyoub du barreau de Béjaïa et défenseur des droits de l'homme pour avoir plus de détails sur les causes et sur les conséquences du divorce en Algérie. En effet et selon notre interlocuteur, le phénomène du divorce en Algérie a atteint, ces dernières années, un niveau alarmant eu égard aux récentes estimations. Pour preuves, les chiffres communiqués par le ministre de la Justice, qui dépassent les 70 000 divorces annuellement, témoignent d’une réalité sociale douloureuse qui est la fragilisation progressive de la famille, considérée comme première cellule de la société et fondement de toute cohésion nationale. Cependant, poursuit-il et sur le plan juridique, le Code de la famille, censé assurer la protection de cette cellule fondamentale, qui est la cohésion familiale, apparaît aujourd’hui incapable de répondre aux défis contemporains. Les mécanismes actuels, souvent centrés sur la rupture plutôt que sur la prévention, ne garantissent nullement la stabilité du couple, ni même la protection des enfants, encore moins de la dignité de la femme et de l’homme confrontés à une procédure de dissolution. Il devient chaque jour plus évident que notre législation familiale demeure figée dans une logique de gestion administrative du divorce, au lieu d’adopter une approche de sauvegarde, de médiation et de responsabilité sociale rétorque l'avocat. Les conséquences de cette situation sont graves selon ses propos. Pour les époux d’abord, le divorce engendre des déchirures morales, des conflits durables, une précarité économique et une rupture de repères affectifs. Mais c’est surtout l’enfant qui demeure la victime silencieuse. Cette situation est catastrophique puisque arraché à un environnement familial stable, balloté entre deux foyers, l'enfant subit les séquelles psychologiques, scolaires et sociales nées d’une séparation qu’il n’a ni choisie ni provoquée. Pour Me Benyoub, quand l'enfant perd l’équilibre de sa famille pour son évolution et épanouissement, c’est toute une société qui perd une part de son avenir. Il poursuit cette analyse et ce constat sans complaisance sur les affres du divorce, que dans un contexte où les tensions économiques, la pression sociale, les mariages précoces et l’absence de dispositifs de médiation aggravent les ruptures conjugales, il devient urgent de repenser profondément notre cadre juridique. Protéger la famille ne doit plus être un simple slogan ni une formule constitutionnelle : cela doit devenir un engagement institutionnel réel, fondé sur la prévention, l’éducation, la médiation et la justice sociale. Il lance un appel pour militer pour la réforme du Code de la famille, ce n’est pas s’opposer à la loi. Au contraire, défendre la société, protéger ses enfants et préserver la dignité des couples est un devoir qui nous interpelle tous. Il préconise, en outre de rappeler, que la famille est l’ultime rempart contre la violence, l’errance et la fragmentation sociale. Lorsque la famille s’effondre, la nation chancelle. Notre interlocuteur affirme que face à l’explosion du divorce, il est du devoir de tous juristes, de responsables politiques, d'éducateurs, d'acteurs sociaux d’exiger une révision courageuse du système juridique afin de redonner à la famille algérienne sa place, sa protection et sa dignité conclut Maître Djamel Benyoub dans cet entretien express.
Divorce en Algérie. Faut-il repenser le cadre juridique ?
- par Nadira FOUDAD
- Le 08 Décembre 2025
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