Vers une révolution agricole technologique

C’est une nouvelle ère qui s’ouvre pour l’agriculture algérienne. Réunis au Centre international des conférences d’Alger, chercheurs, experts et responsables publics ont répondu à l’appel du ministre de l’Agriculture, du Développement rural et de la Pêche, Yacine El-Mahdi Oualid, pour jeter les bases d’une transformation profonde du secteur. Objectif affiché : faire de l’Algérie une puissance agricole régionale capable d’assurer la sécurité alimentaire d’une population appelée à dépasser les 65 millions d’habitants. Le constat dressé par le ministre est lucide : malgré d’immenses potentialités, la productivité reste faible. Le rendement moyen des céréales plafonne à 18 quintaux à l’hectare, loin des 35 observés dans des pays au climat similaire. La productivité laitière demeure modeste, et près de 30 % de la production agricole se perd encore faute d’infrastructures de stockage performantes. À cela s’ajoute une utilisation limitée des techniques d’irrigation modernes — à peine 15 % des surfaces irriguées — dans un pays où l’eau devient un enjeu vital. Face à ces défis, le ministère entend enclencher une véritable «révolution agricole» fondée sur la science, la technologie et l’innovation. Au cœur du plan, une meilleure gestion de l’eau : généralisation du goutte-à-goutte, utilisation des eaux traitées et valorisation des 100 milliards de m³ de précipitations annuelles, dont seulement 7 % sont exploités aujourd’hui. L’ambition est claire : porter le rendement des céréales à 35 quintaux par hectare d’ici cinq ans grâce aux semences améliorées, à l’agriculture de précision et à l’intelligence artificielle. La modernisation passera aussi par la numérisation. Pour le professeur Brahim Mouhouche, expert en sécurité alimentaire, «sans données fiables, toute décision demeure aléatoire». Un système national unifié d’information agricole verra ainsi le jour, appuyé par les satellites, les drones et les start-ups spécialisées dans l’agriculture intelligente. Dans le même esprit, la création du Conseil scientifique national pour la sécurité alimentaire, installé conjointement avec le ministère de l’Enseignement supérieur, illustre la volonté d’ancrer la recherche et l’innovation au cœur de la politique agricole. Ce conseil rassemblera 34 chercheurs et aura pour mission d’orienter les politiques publiques selon des approches scientifiques. Entre les vastes terres sahariennes à exploiter et les Hauts Plateaux propices aux cultures fourragères, l’Algérie dispose des atouts nécessaires pour bâtir un modèle agricole durable, résilient et exportateur. Mais la réussite de cette transition reposera sur la capacité du pays à conjuguer technologie, savoir et volonté politique. La révolution verte algérienne, cette fois, veut s’écrire au futur.


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