Algérie-UE, vers un nouvel équilibre

Le «nouveau pacte pour la Méditerranée» pourrait bien marquer un tournant dans les relations parfois heurtées entre l’Algérie et l’Union européenne. L’ambassadeur de l’UE à Alger, Diego Mellado Pascua, a voulu y voir «une opportunité pour dépasser la crise qui caractérise l’accord d’association entre l’Algérie et l’Union européenne», un texte signé en 2002 mais resté, depuis, au cœur de vives controverses. S’exprimant lors d’une journée d’étude à la fondation Konrad Adenauer (KAS), Mellado a insisté sur la philosophie du pacte: «Un partenariat d’égal à égal, mais où chacun défend ses intérêts», relaye El Watan. L’Europe, dit-il, «cherche des compromis et des terrains d’entente», espérant faire de la Méditerranée «un espace commun de stabilité, de prospérité et de sécurité». Un discours d’ouverture, à quelques semaines de l’adoption officielle du pacte, prévue fin novembre. Mais Alger, elle, reste prudente. L’accord d’association, largement critiqué par les économistes, a tourné à l’avantage de l’Europe. Le professeur Moussa Boukrif, de l’université de Béjaïa, parle sans détour d’un «partenariat asymétrique avec coûts élevés pour l’Algérie». Selon lui, l’ouverture aux produits européens a entraîné désindustrialisation et pertes fiscales, tandis que les investissements européens, concentrés dans l’énergie, «n’ont ni diversifié l’économie ni créé d’emplois». Consciente des déséquilibres, l’Algérie plaide désormais pour un rééquilibrage. À la veille de la deuxième réunion de la commission mixte Algérie-UE, prévue à Bruxelles, Alger entend défendre une relation «plus juste et plus réciproque». Le député Sid Ahmed Tamamri l’a rappelé: «Le passé a montré que les intérêts penchaient trop en faveur de l’Europe». De son côté, Mohand Amokrane Nouad, ancien coordinateur d’un programme euro-algérien, souligne que «le terme de révision est clair: il fallait revoir ces accords». Pour lui, seule une approche «produit par produit» permettra d’instaurer un vrai partenariat «gagnant-gagnant». Et si Bruxelles reconnaît la nécessité de revoir sa copie, c’est que la donne géopolitique a changé. L’Algérie a élargi son horizon -vers la Chine, les BRICS et l’Afrique-, tout en devenant un acteur énergétique incontournable pour l’Europe en crise. Comme le résume un diplomate européen à Alger: «L’Europe ne peut contourner l’Algérie, mais l’Algérie ne peut ignorer l’Europe». Reste à savoir si le nouveau pacte saura transformer cette interdépendance en véritable coopération équilibrée.


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