El Fasher, capitale du Darfour du Nord, vit au rythme d’un siège qui dure depuis plus de 500 jours. La guerre civile soudanaise, qui oppose depuis avril 2023 les Forces de soutien rapide (FSR) de Mohammed Hamdan Daglo, dit «Hemetti», à l’armée régulière du général Abdel Fattah Al-Bourhane, s’est transformée en l’une des pires catastrophes humanitaires du monde. Et le cercle se resserre encore autour des centaines de milliers de civils pris au piège. «Consterné» par les attaques incessantes des FSR, le Secrétaire général de l’ONU, António Guterres, appelle à «un cessez-le-feu immédiat à El Fasher» et met en garde contre de graves violations du droit international humanitaire, souvent à caractère ethnique. Son porte-parole, Stéphane Dujarric, évoque un bilan partiel d’au moins 125 morts depuis le 11 août, un chiffre «probablement sous-estimé». À cette violence s’ajoute la faim, la maladie, et désormais le choléra. Plus de 8 500 cas et 361 décès ont été enregistrés au Darfour, principalement parmi les femmes et les enfants. «La vie est devenue insupportable à cause des épidémies, de la faim et d’une guerre qui tue en silence», alerte Adam Rajal, porte-parole de la coordination soudanaise pour les réfugiés et déplacés. Les hôpitaux, déjà réduits à 20 % de leur capacité, manquent cruellement de médicaments essentiels comme les solutions de réhydratation. Edem Wosornu, directrice des opérations de l’OCHA, revient de Khartoum et d’El Fasher avec un constat glaçant : «Le Soudan est à genoux. Trente millions de personnes ont besoin d’aide, plus de 600 000 sont frappées par la famine. C’est plus de la moitié du total mondial». Elle décrit une capitale transformée en «ville fantôme», des camps au Tchad saturés, et des convois humanitaires bloqués à quelques kilomètres des zones assiégées. Face à cette tragédie, la diplomatie s’accroche à un fil ténu. L’Envoyé personnel du Secrétaire général, Ramtane Lamamra, affirme poursuivre le dialogue avec les parties. Il se dit prêt à soutenir «les efforts sincères pour mettre fin aux violences et amorcer un processus politique inclusif. Mais le temps presse. Entre famine, choléra et bombardements, le Darfour est devenu le théâtre d’une guerre totale contre les civils. Et les mots d’un étudiant rencontrés par l’ONU résonnent comme une accusation : «Si le Soudan était sur un autre continent ou d’une autre couleur, le monde se soucierait davantage de nous».