Accord UE-USA: Bruxelles plie

Signé à Édimbourg entre Donald Trump et Ursula von der Leyen, l’accord commercial UE-USA du dimanche sonne comme une reddition en ordre dans une guerre que l’Union ne voulait pas mener. Pour éviter des droits de douane punitifs de 30 %, les Européens ont accepté un compromis imposant une taxe de 15% sur leurs exportations vers les États-Unis. Un « bon accord » selon la présidente de la Commission. Un «plus grand deal jamais passé», fanfaronne Trump. Mais derrière le vernis diplomatique, c’est une Europe divisée et affaiblie qui émerge. Loin de se limiter aux droits de douane, l'accord consacre en coulisses l’alignement stratégique de l’UE sur Washington, avec l’engagement implicite d’achats massifs de gaz et d’armements américains, imposés par Trump comme conditions non négociables du compromis. En France, la stupeur l’emporte. François Bayrou fustige «un jour sombre» et une «soumission» à Washington. Les critiques pleuvent, y compris dans le camp présidentiel. Roland Lescure parle d’un «aveu de faiblesse historique». L’ancien négociateur, Michel Barnier, pointe l’«impuissance» de Bruxelles. Même à gauche, Olivier Faure et Manuel Bompard dénoncent l’inertie de l’exécutif, appelant à la confrontation plutôt qu’à la résignation. Mais ailleurs en Europe, le ton est moins dramatique. À Berlin, le chancelier Friedrich Merz salue un accord qui «évite une escalade inutile». L’Italie et l’Irlande, bien que critiques sur le fond, y voient une nécessaire stabilité après des mois de menaces. L’Espagnol Pedro Sanchez l’approuve, sans enthousiasme. Ce consensus mou masque mal une réalité gênante: l’UE s’est présentée à la table des négociations désunie, chaque État défendant ses intérêts. Sur le plan politique, c’est une victoire tactique de Trump. Il impose une taxe unilatérale et en fait un symbole de force face à un Vieux Continent incapable de riposte. Sur le plan économique, l’impact immédiat est limité: 0,3 point de PIB en moins selon la Société Générale. L’Europe évite ainsi une spirale stagflationniste. Mais à long terme, le signal est désastreux. Aucune mesure de rétorsion n’a été retenue. L’UE qui s’était dotée d’un instrument anti-coercition, l’a laissé au placard. Ce manque de courage stratégique pourrait nuire à sa crédibilité sur la scène internationale. Comme l’a résumé un diplomate européen: «Ce n’est pas une capitulation, c’est un repli stratégique». Le problème, c’est qu’à force de se replier, l’Europe finit par disparaître du champ de bataille.


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