Paru le 03 octobre 2024 chez l’Harmattan. Tarik Histoire oubliée d’un héros berbère

Comme le résume succinctement la présentation en quatrième page de couverture, l’ouvrage raconte la vie de Tarik ibn Ziad d’avant la conquête de l’Espagne.
Ce pan de la vie du chef berbère, ô combien éclairant d’un moment déterminant de l’histoire de la région, semble n’avoir jamais fait l’objet d’aucune publication littéraire ou scientifique. Le récit offre également, en lien avec le sujet, des brèves plongées dans l’histoire des trois États concernés par ce qu’il se passait dans la région au cours de cette première décennie du 8e siècle. À savoir : l’Espagne sous les derniers rois wisigoths et les débuts de la persécution des Juifs ; l’Empire romain d’Orient dans sa toute magnificence et ses turbulences internes ; le califat arabo-musulman sous les Omeyyades, première dynastie du pouvoir héréditaire en islam, et ses turpitudes.
L’histoire de l’Afrique du nord a droit aussi à des immersions de même type, à cette différence près qu’on n’en sortira pas sans porter sur cette histoire et ses mythes, tant côté berbère qu’arabe, un regard autre que celui légué par les idéologues coloniaux. Tarik ibn Ziad, du seul fait qu’il fût à l’origine d’Al-Andalus, est la figure berbère qui aura marqué le plus durablement à la fois l’histoire des Berbères et celle du monde. En témoignent, d’abord, dès la fin du 8e siècle, l’apparition des premiers États berbères de pleine souveraineté, ensuite, à partir du 9e, le rayonnement scientifique d’une civilisation multiculturelle unique dans l’Histoire de l’Humanité, sur une Europe corsetée pendant des siècles encore dans les dogmes asphyxiants de la pensée scolastique.
Or, suprême paradoxe, ce chef berbère, dont Gibraltar perpétue la mémoire, est encore de nos jours, pour le commun des mortels, un parfait inconnu, sinon, pis encore, un fanatique inculte, frustre, cruel et parfois même d’apparence terrifiante. Comme s’il ne suffisait pas qu’il soit, de fait, ostracisé, les rarissimes écrits épars qui existent à son sujet en ont fait un repoussoir qui n’inciterait à s’intéresser ni au personnage ni à son œuvre. Ce qui laisse pour le moins dubitatif. On l’a compris : cette fiction, basée sur des faits avérés mais non explicités, est une forme de réhabilitation qui se justifie à maints égards. Voici donc pour la première fois un Tarik ibn Ziad comme on ne l’a jamais montré (pour des raisons que le lecteur découvrira tout seul) : un jeune héros déjà au faîte de sa gloire avant même qu’il ne parte à la conquête de l’Espagne, porté par un idéal d’une étonnante modernité et, de surcroît, romantique impénitent.
Un mot enfin à propos de l’illustration de la couverture. L’œuvre est une huile sur bois, signée de mon ami Sid Ahmed Chaabane. Il y a là toute l’acuité du regard et la sensibilité à vif de l’artiste. Le style impressionniste résonnant bien avec l’idée de mémoire, Sid a bien saisi ce moment crucial et indéfini où l’on ne sait encore si la mémoire « oubliée » est en train de refaire surface ou de s’estomper avant de disparaître à jamais.
Tout cela est proche du rêve, et des cavaliers à cheval sur un rocher en bordure de la mer, comme hésitant à sauter, est une vision fantastique proprement onirique.


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