Guerre d’Algérie, la France encore accusée

Le 11 mars 2025, France Télévisions a annoncé la déprogrammation du documentaire Algérie, Sections Armes Spéciales, initialement prévu le 16 mars sur France 5. Cette décision a suscité un vif tollé, notamment en raison de son contenu abordant la guerre chimique menée par la France en Algérie, dans un contexte diplomatique tendu entre les deux pays. France Télévisions a justifié ce report par l'actualité internationale, mais a promis de reprogrammer le film, sans préciser de date. En attendant, le documentaire est disponible sur la plateforme en ligne France.tv. Le réalisateur et historien, Christophe Lafaye, co-auteur du film, avait exprimé ses inquiétudes concernant les difficultés de traiter un sujet aussi sensible. Christophe Lafaye a découvert l’utilisation d’armes chimiques par l’armée française pendant la guerre d’Algérie, lors de ses recherches pour sa thèse où il s'intéressait à l'armée française en Afghanistan, comme il l’a indiquée à L’Humanité. En 2011, il a appris que des techniques de combat souterrain, développées en Algérie, étaient utilisées par les forces françaises en Afghanistan. C'est alors qu'il a découvert les «sections armes spéciales», créées en 1956, qui ont mené des opérations en Algérie, y compris l’usage d’armes chimiques. L’historien a rencontré en 2015, Yves Cargnino, un ancien combattant de ces sections dont les témoignages ont révélé l'ampleur de l'utilisation de ces armes. La France, face à la montée en puissance de l’Armée de Libération Nationale et à la tactique des résistants utilisant des grottes et des souterrains, a eu recours à des armes chimiques pour surmonter cet avantage tactique. En effet, des enfants, des vieillards, femmes avec leurs bêtes ont été brûlés ainsi que des villages entiers. Cette violence extrême a perduré tout au long de la colonisation et s’est intensifiée pendant la guerre d’Algérie. «Je refuse que les archives soient fermées pour des raisons de sensibilité, alors que nous avons absolument besoin de connaître notre histoire», a déclaré la journaliste et réalisatrice du poignant documentaire L’Algérie, section armes spéciales, Claire Billet. Dans une déclaration à la Chaîne 3 de la Radio algérienne, Claire Billet revient sur la genèse de son documentaire percutant et évoque les moments marquants du tournage, notamment les «témoignages douloureux d’une mémoire traumatique». L’ex-chroniqueur de RTL, Jean-Michel Aphatie, reconnaît que sa comparaison entre les massacres nazis à Oradour-sur-Glane et ceux commis par la France en Algérie a pu choquer. Cependant, il maintient sa dénonciation des crimes coloniaux, estimant qu’ils doivent être reconnus et débattus, dans un entretien à «Libération». Passionné par l’histoire de De Gaulle, il a progressivement pris conscience de cette réalité à travers ses lectures et ses recherches, malgré l’indifférence ou le rejet que suscitait ce sujet. Son engagement à en parler n’a fait que se renforcer au fil des années, convaincu de la nécessité de ne pas occulter cette part sombre de l’histoire française. La France «néocoloniale» a peur de la vérité de ses crimes et que cette vérité soit connue par tous le jeunes français.


ads