70ème anniversaire du 1er Novembre 1954. La révolution Algérienne, un symbole éternel

Le 70ème anniversaire du déclenchement de la révolution algérienne se veut une halte pour cet événement majeur de l’histoire nationale qui a marqué la rupture avec le système colonial Français de plus de 132 années d’occupation. Le 1er novembre 1954, qui a donné naissance à une Révolution Glorieuse, demeure une source d’inspiration pour tous les mouvements dans leur combat pour la liberté. La Révolution algérienne a été une source d’inspiration pour beaucoup de mouvement de libérations dans le monde dont le leader sud-africain Nelson Mandela et Yasser Arafat, le leader Palestinien, Che Guevara et beaucoup d’autres… Des mouvements qui soulignent, à chaque fois si besoin est, le rôle de l’Algérie en termes de soutien aux mouvements de libération et sa prise de position en faveur des peuples opprimés. Nelson Mandela n’a pas tari d’éloge pour cette Révolution reconnaissant sans ambages que: "c'est l'Algérie qui a fait de moi un homme". L’Algérie commémore le 70e anniversaire du déclenchement de sa glorieuse révolution les yeux rivés au Moyen Orient, où l’armée d’occupation israélienne massacre des civiles désarmés, à huit clos, à Gaza et au Liban. L’Etat hébreu utilise les même procédés qu’a utilisés l’armée française durant son occupation en Algérie ; bombardement de civils désarmés, création de zones interdites, déportation des populations et leur spoliation de leurs biens, désinformation et désignation par le nom de terroriste les combattants comme ce fut fait par la France pour les Moudjahidine de la guerre de libération nationale. L'Organisation du traité de l'Atlantique Nord (OTAN) qui a soutenu la France coloniale durant la guerre d’Algérie est aussi, avec tout l’occident, aujourd’hui, aux côtés d’Israël qui a massacré plus de 40 000 civils Palestiniens sans défense et n’épargne ni femme, ni enfants et ni même les blessés dans les hôpitaux. Mohamed Boudiaf s’avait déjà, en 1961, dans «le commencement», écrit à Turquant, que le 1er novembre n’est nullement une simple «nuit de la Toussaint», mais bel et bien «une marche historique qui a bouleversé un continent et qui n’a pas fini d’étonner le monde par sa puissance, sa vitalité face à un adversaire désorienté et complètement déréglé». Si Tayeb El Watani prédisait déjà, qu’«un jour viendra où tous les crimes seront connus et, à ce moment, on oubliera volontiers de parler aussi légèrement du 1er novembre 1954»; ce n’était nullement une prémonition légère mais une conviction profonde de l’homme. Au début des années 60, dans l’euphorie de son indépendance retrouvée, l’Algérie s’érige en terre d’accueil des mouvements anticoloniaux et révolutionnaires du monde entier. Durant plus d’une décennie, les gouvernements successifs, de Ben Bella et de Boumediene, apportent leurs soutiens actifs à tous les militants du tiers monde en lutte contre l’oppression coloniale ou raciale. L’Algérie post indépendance s’est distinguée en jouant en Afrique un rôle analogue à celui de Cuba en Amérique latine. L’internationaliste Che Guevara y établit la base arrière pour ses activités de guérilla en Afrique. Le leader afro-américain Eldridge Cleaver en fait le centre de rayonnement international du Black Panther Party. Du Congrès national africain (ANC) de Nelson Mandela au Parti africain pour l’indépendance de la Guinée et du Cap vert (PAIGC) d’Amilcar Cabral, tous les mouvements de libération africains sont aidés financièrement et militairement par l’Algérie. De nombreux militants sud-américains trouvent également asile dans le pays. Alger est appelée, durant cette période, La Mecque des Révolutionnaires. Tout cela est couronné, en 1969, par l’accueil de l’Algérie du premier festival culturel panafricain, qui est devenu une tribune politique majeure pour les pays émergents. Ce festival s’est distingué en rassemblant «une Afrique fraternelle, bouillonnante de créativité et d’espoir, où l’esprit révolutionnaire habite plus que jamais les rues de la ville blanche», relevaient beaucoup d’observateurs de cette époque. Des artistes de toutes les disciplines sont rejoints par les représentants des mouvements de libération de l’Angola, de l’Afrique du Sud, du Vietnam. Et, plus étonnant encore, par les Black Panthers venus d’Amérique, qui ouvrent leur bureau international à Alger. La vedette sans conteste de cette rencontre africaine d’Alger était Marien Makiba ou la Mama Africa, qui avait interprété Pata Pata, mais aussi une chanson en arabe algérien «Ana Hourra fi El Djazaïr», (je suis libre en Algérie) des paroles qui signifiaient tant pour celle qui venait de Soweto. Au nom de l’Algérie, le Président Boumediene lui avait remis un passeport algérien. Le symbole était fort en 1969. Amilcar Cabral, révolutionnaire Guinéen, disait alors sans ambages que « les chrétiens vont au Vatican, les musulmans à la Mecque et les révolutionnaires à Alger ». C’était une époque de l’histoire du 20e siècle où la scène politique internationale était caractérisée par la Guerre froide et les deux blocs. L’Algérie proposait alors une autre voie et était une voix des peuples opprimés. Une Algérie qui s’est mise à la disposition des causes justes et solidaires avec des mouvements de libération dans le monde. La Révolution Algérienne n’est pas venue du néant et est liée avec l’histoire de ce qui l’a précédée, en particulier des nombreux mouvements de résistance à la colonisation de l’Algérie qui ont eu lieu avant son déclenchement. C’est ce que s’accordent à dire beaucoup d’historiens des deux rives de la méditerranée dont Gilbert Meynier qui tenait à souligner que «le déclenchement de la lutte armée en Algérie ne retentit pas comme un coup de tonnerre dans un ciel serein», et ce, en dépit des assertions officielles françaises qui «affectèrent, publiquement, sur le registre du fait divers, d’imputer l’événement à une organisation de malfaiteurs et/ou, dans le contexte de guerre froide, intriqué avec la méfiance à l’égard des suites politiques de la révolution égyptienne du 23 juillet 1952, elles dénoncèrent la main du Caire, représentée comme n’agissant que sur les directives de Moscou». En novembre 1954, nombre d’observateurs lucides, en France et ailleurs, percevaient bien ce qui était en cause et ce qui se produisait , «au point d’avoir dangereusement mis en cause ses valeurs, son équilibre psychologique et jusqu’à sa cohésion nationale», selon Si Tayeb EL Watani. En effet, une révolution épique, à écho retentissant, à laquelle la France ne s’attendait guère, a emporté la IVe République, en 1958. Cette guerre pour l’émancipation algérienne était une plaie béante pour la France qui dénonçait pourtant « la barbarie nazie, les tortures, les déportations, les exécutions sommaires ». Dans le subconscient général, « il n'était donc pas possible que l'Armée Française ait pu se conduire comme les nazis ; cela ne pouvait être que des exceptions qu'il fallait cacher », témoigne Henri Pouillot, ancien appelé du contingent français, affecté au centre de torture qu’était la Villa Susini à Alger. Le 1er novembre c’est aussi l’esprit et la lettre qu’il fallait expliquer en mettant à profit des supports écrits et audiovisuels comme complément de la lutte armée dont le FLN avait réussi à renvoyer une image moderniste des aspirations révolutionnaires du peuple algérien. Alimenté ainsi, le pourquoi du 1er novembre était posé, avec acuité, d’abord, par ses instigateurs, une poignée certes, mais résolus qui - après épuisement de tous les moyens antérieurs de lutte et de revendications émancipatrices - avec détermination, avaient bouleversé, par l’action directe, le cours de l’histoire, en s’adressant, en Novembristes, au peuple algérien en ces termes homériques : « A vous qui êtes appelés à nous juger…». A cet égard, la proclamation du 1er Novembre 1954, document politique fondamental de la Révolution Algérienne, parmi les plus étudiés par les historiens, - n’ayant pas justement fait fi du mouvement national depuis la création de l’Etoile Nord-Africaine - était l’émanation directe des événements de 1945 avec qui le lien était tellement étroit qu’il mérite d’être souligné, mais à la différence que le peuple algérien qui y a manifesté alors, croyait encore en la possibilité de recouvrer ses droits par des moyens pacifiques. «Instruit par son premier échec, à ne plus commettre d’erreurs et à utiliser les moyens adéquats capables de faire face à la force qu’on lui a toujours opposée » - notait Boudiaf, architecte du 1er Novembre – un authentique sursaut populaire héroïque et salvateur engendra une date, une révolution libératrice, essaimée à travers le monde, en symbolisant un flamboyant modèle de résistance pour les peuples opprimés dans le monde. 70 années après son déclenchement, la révolution algérienne reste ce symbolique éternel d’un peuple en lutte qui a arraché sa liberté au prix fort d’un million et demi de martyrs. Le symbole aussi d’un défi d’une poignée d’Hommes qui ont décidé de changer le cours de l’histoire, après que les mouvements politiques, toutes tendances confondues, eurent épuisé tous les moyens de lutte. Pas seulement pour l’Algérie et les Algériens, la Révolution Algérienne restera à jamais ce symbole éternel de défi, de fierté, de dignité, d’espoir et d’espérance pour le monde entier.


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