Achaacha, une région sans perceptives économiques visibles
Par Lotfi Abdelmadjid
La daïra de Achacha, contrée située à l’extrême Est de la wilaya, recèle, effectivement, un potentiel naturel quasi inexploité et une jeunesse intellectuelle inestimable. Ces dernières années, les actions publiques inscrites dans le cadre du développement local ont métamorphosé le cadre de vie des citoyens. Certes, les autorités de la wilaya ont déployé d’énormes efforts dans cette localité afin de préserver l’harmonie et l’équilibre entre les citoyens de la wilaya. Nonobstant, la population de cette région, avec ses quatre communes, ne s’explique toujours pas le manque de perspectives économiques qui pourraient la propulser à un rang socioéconomique sensiblement enviable. Achacha vit actuellement un dilemme qui ne déchiffre guère le marasme de cette province car l’activité économique n’a jamais pu se promouvoir car elle est, probablement, victime de son manque de stratégie. Sur ces territoires, on doit travailler sur un plan d’investissement spécial qui servirait à donner un essor à l’économie. Son potentiel agricole n’a jamais été extensif, les ruraux ne comptent que sur des petites parcelles ou des serres pour des cultures vivrières. Par conséquent, même si l’on croirait que sa vocation est agricole, ce secteur n’absorbe pas la main-d’œuvre excédante locale. Celle-ci a toujours été contrainte d’aller chercher de l’embauche hors daïra et même wilaya, notamment vers Maghnia (Tlemcen). Pour ce qui est du potentiel touristique, celui du balnéaire et autre n’est toujours pas exploité. Sur cette localité et sur plus de cinquante kilomètres de côte, des projets touristiques pourraient insuffler l’économie car le potentiel naturel est là. Achacha reste quand même très éloignée de l’industrie car aucune politique n’a envisagé, jusque-là, de créer des zones d’activités industrielles. Il fut une période où on avait préconisé des mini-zac pour chaque commune pour la relance des moyennes et micro entreprises même si au chef-lieu de la daïra, on y a réservé la parcelle de ‘’Cosider’’…mais rien n’a été fait. Sur le plan commercial, les ‘’Achachis’’ vivent toujours au mode ‘’Souk’’ même si les commerçants aspireraient à un vrai marché hebdomadaire d’intérêt local. Une telle situation laisserait la daïra, stagnée sans perspectives réelles car sur son territoire, il n’y a presque aucun projet porteur d’espoir pour un taux de population jeune, plus élevé que la moyenne. L’espoir pour les milliers de jeunes étudiants, sortis de l’université et des centres de formation professionnelle, est illusoire car le chômage y a pris place. L’exode des intellectuels vers les grandes villes est frappant car les diplômés ne trouvent guère de débouchés. Le taux des ‘’harragas’’, à une époque donnée, était le plus élevé de la wilaya. La région qui est notablement militante ayant marqué son passé glorieux par le sang de ses chouhadas, a raté le coche du développement économique. Aujourd’hui, Achacha vit une situation économique qui incite à une réflexion profonde car l’équation reste, toujours, à plusieurs inconnues.
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Souika Ethatanya : Chronique d’un quartier oublié
Par H. Med Krelifa
Le charme et l'allégresse de la vie d'autrefois dans le quartier emblématique de la Souika Tahtania, relevant de la médina de Tidgditt. Loin s'en faut, la génération actuelle a tendance à qualifier notre vécu d'«autrefois» comme étant synonyme d'une vision moyenâgeuse. Le devoir de mettre en lumière l'histoire de la ville par les souvenirs de la Souika Tahtania, imprégnés de nostalgie, d'amertume et de tristesse, restant gravés dans la mémoire de ceux qui ont résidé ou fréquenté ce quartier mythique de Sidi Allal M’hamed et du makaâm de Sidi Benaïssa et sa zaouïa. L'âge d'or: un tissu économique et social intense pour la génération de l’époque, le passé n'est pas si loin. Souika Tahtania n'était pas une cité-dortoir, mais un tissu économique intense dont les Tidgdittiens étaient fiers. L’histoire récente de la ville rappelle un vivre ensemble exceptionnel et un mode de vie marqué par la solidarité et le partage, le respect et la sagesse (la horma étant de rigueur pour les riverains), la convivialité ainsi que la méditation soufie (liée au caractère mystique et cultuel de Sidi Allal M'hamed, Sidi Cheikh Benaïssa, Sidi Hamou Cheikh). Le passage de Tabana et l’ambiance du quartier jadis où on descendait les marches de Tabana pour aboutir au sublime Souika, le seul passage autorisé par l’administration coloniale pour rejoindre également le centre-ville. Avant le pont construit après les inondations de 1917, à droite, se dressait un majestueux moulin à eau, jouxtant Hammam «El Ghar» (Aujourd'hui, ces deux bâtisses sont en ruine, rongées par l'érosion du temps). En traversant le pont, à gauche, se trouvait le Hammam Esbaâ (bain maure du Lion), propriété de l'honorable famille Benkoula. (Aujourd'hui squatté). A l'entrée principale faisait face au café, il gênait les clientes; une entrée discrète avait été aménagée derrière, au niveau de la rue 16, pour garantir la discrétion des familles. En ce qui concerne les lieux de vie, de commerce et de transport, Souika Tahtania était un lieu de centralité qui drainait une population hétéroclite et importante, venant de tous les coins de Tigditt et d'ailleurs. Les seniors s'y adonnaient à leurs jeux de société (ronda, sopage, belote, dominos, loto, etc.). On y trouvait le café de feu Kassab (sur le dos de l’oued AïnSéfra, avec sa terrasse). Le café de feu Moghtit (faisant face au café Kassab et mitoyen au Hammam Sbâa). Le café d’El Hassira (où l'on jouait sur des nappes en jute). Le café Tahaleiti. Le Rôle de la Souika Tahtania comme Hub. Le service de transport public de feu si Osmane, propriétaire d'un chariot avec un attelage de 08 chevaux, stationnait chaque soir près du café Kassab, avant qu'il n'amène ses chevaux à l'écurie près de son domicile, rue 16. En allant vers le mausolée de cheikh Benaïssa et en remontant les ruelles, on trouvait le marchand de beignets: feu Abdellouaheb (militant du PPA, moudjahed). L'artisan de babouches: feu si Boubekeur. L'artisanat à base d’alfa (couffins, midounettes, nappes, etc.), l'épicerie: feu Es-Sehli, et l’épicerie 'épicerie: des deux frères Benkoula (Hadj Lakhdar et Hadj Mohamed) qui habitaient juste dans l'impasse. Enfin, le four banal: appartenant à l’artisan boulanger feu Bendjeloul surnommé «Bendjen» avec son apprenti Koko. Toutes ses activités donnaient une vie éclatante au quartier. Ensuite, viennent les repères spirituels et éducatifs pour marquer non seulement un espace de vie mais plutôt la foi d’une population attachée à sa spiritualité et à ses traditions car Souika Tahtania était la représentation locale de la confrérie soufie. Elle joua un rôle actif dans l'enseignement et la pratique du soufisme. Cette clarification ancre encore davantage l'histoire du quartier de Tigditt dans une riche tradition spirituelle telles la mythique rue 16 qui abritait une école coranique où professait feu SiMostepha (en 1947), la médersa était un haut lieu du nationalisme et de la connaissance islamique. Les années qui passent écrèment les souvenirs car il reste clair que Souika Tahthanya fait partie d’un patrimoine culturel que Mostaganem doit valoriser au profit de la mémoire.
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L'odyssée solitaire d'une parlementaire engagée
Par Y. Zahachi
A Mostaganem, cette wilaya côtière du nord-ouest algérien, comptant près de 800.000 âmes, si ce n’est pas plus actuellement, représente un terreau fertile en histoire et en défis socioéconomiques. Pour planter les décors, disons que, depuis l'avènement du multipartisme dans les années 1990, pas un seul élu de l'Assemblée populaire nationale (APN) ou du Conseil de la Nation, sur des dizaines de mandats qui se sont succédé, n'a daigné ouvrir une permanence fixe et accessible à ses administrés. Chaise vide érigée en doctrine, électorat relégué aux oubliettes, carrières nationales lustrées à Alger pendant que les citoyens se noient dans la bureaucratie, tel est le réquisitoire implacable, gravé dans les archives locales désertées et les rapports nationaux muets sur de telles initiatives. L'abstention record de 65% aux législatives de 2021 dans la wilaya, n'est pas un hasard; c'est le cri d'une population abandonnée par ceux censés la servir. Au milieu de ce vide sidéral émerge Mme Hadjira Abbès, unique femme députée de Mostaganem à l'APN sous l'étiquette El Bina, élue triomphalement en 2017, réélue en 2021 pour un mandat courant jusqu'en 2026. Rappelons que pour ceux qui ne la connaissent pas encore, à chaque sortie d’inspection et de travail du wali, l’infatigable Ahmed Boudouh qui suit tous les projets de développement, Abbès Hadjira est aux premières lignes immanquablement. En tant que vice-présidente du groupe parlementaire El Bina, cette battante a accompli l'impensable, il y a plus de trois ans: planter son drapeau au cœur du quartier historique de Tigditt, ce bastion symbolique de la résistance où le FLN forgea ses bases clandestines durant la guerre de libération nationale (1954-1962). Sa permanence, unique en son genre dans tout le panorama parlementaire algérien, n'est pas un gadget électoral; c'est un rempart ouvert tous les samedis, à un flux incessant de quelque 200 citoyens, en moyenne par jour. Veuves privées de pension ou de logement, jeunes piégés dans un chômage endémique flirtant avec les 25% localement, familles engluées dans des labyrinthes fonciers hérités des réformes agraires des années 1990 …et bien plus encore de cas, les uns plus saugrenus que les autres. Tous affluent, dossiers sous le bras, pour y trouver une oreille, un conseil, une orientation. Assistée d'un juriste chevronné et d'un secrétaire minutieux, elle trie les plaintes – des plus complexes (contentieux agraires multi générationnels) aux plus prosaïques (délais administratifs kafkaïens) –, transmet avec acharnement et suit jusqu'au dénouement. "Écouter, ce n'est pas seulement un devoir électif, c'est tendre la main à l'espoir confisqué, au-delà de toute mission formelle", confie-t-elle avec une détermination qui claque comme un défi lancé à la caste. La médiation de la parlementaire, a fait bouger les lignes, grâce à une administration locale enfin collaborative. Les fruits ne se font pas attendre: des centaines de dossiers débloqués, des familles sauvées du désespoir, une confiance renaissante dans un système perclus de scepticisme. Tigditt n'est plus un simple quartier; c'est devenu le phare d'une proximité parlementaire introuvable ailleurs, un modèle qui, s'il était répliqué, pourrait faire chuter l'abstention, relancer la démocratie locale et catalyser des réformes urgentes : urbanisme résilient face au climat, emploi des jeunes via des formations ciblées, accès équitable aux soins. Mme Hadjira Abbès n'est pas qu'une exception isolée, elle est le miroir qui donne espoir aux citoyens.



