Symbole de résistance durant la Révolution et perle patrimoniale. Les Planteurs et Ras El Aïn restent dans l’ombre

Ancien quartier, symbole de résistance durant la Révolution et perle patrimoniale dominant Oran, les Planteurs se retrouvent aujourd’hui dans une situation paradoxale: vivre dans des conditions dignes des villages reculés alors qu’ils se trouvent au cœur de la deuxième ville du pays. Une anomalie urbaine qui interroge et indigne. Et le malaise touche également leur voisin direct, Ras El Aïn, confronté aux mêmes carences. Sur les hauteurs d’Oran, le quartier des Planteurs continue de porter fièrement son histoire. Entre ruelles étroites, escaliers anciens et maisons accrochées à la pente, le lieu respire la mémoire d’une époque où il représentait un bastion de résistance et un passage animé vers Santa Cruz. Aujourd’hui pourtant, ce décor chargé d’histoire se trouve rattrapé par une réalité bien moins glorieuse : celle de l’abandon urbain. Les Planteurs souffrent d’un déficit chronique de prise en charge. Les routes y sont fortement dégradées, l’éclairage fonctionne par intermittence, les réseaux sont vétustes et l’hygiène laisse à désirer. Pour les habitants, le constat est clair: le quartier recule pendant que le reste de la ville avance. Mitoyen des Planteurs, le quartier de Ras El Aïn connaît exactement les mêmes manques: chaussées détériorées, absence d’entretien, éclairage faible et une prise en charge quasi inexistante. Les deux zones vivent le même quotidien difficile, comme si les hauteurs d’Oran étaient condamnées à rester à la marge. Le président du comité de quartier des deux zones, M.Baghdad, ne cache plus sa frustration: «Nous avons adressé des dizaines de doléances aux services concernés, mais sans le moindre résultat», déplore-t-il. Son témoignage reflète le désarroi d’une population qui ne réclame que le minimum: une intervention sérieuse et durable. Aux difficultés structurelles s’ajoute un manque flagrant de transport public. Quelques véhicules vieillissants, de véritables épaves parfois, assurent tant bien que mal la liaison vers les Planteurs et Ras El Aïn. Ces bus, souvent en mauvais état, ne respectent ni les horaires ni les rotations. Les habitants dénoncent un service aléatoire, incapable de répondre aux besoins quotidiens, accentuant encore davantage le sentiment d’isolement des deux quartiers. Depuis des années, les habitants des Planteurs comme de Ras El Aïn multiplient les sollicitations. Mais la plupart restent sans suite, renforçant le sentiment d’être complètement ignorés. Cette passivité administrative nourrit un malaise profond sur les hauteurs de la ville. Ce qui choque, c’est la contradiction flagrante avec les orientations nationales. Le président Abdelmadjid Tebboune a rappelé à plusieurs reprises que les zones d’ombre concernent avant tout les douars, les hameaux et les villages reculés. Ces zones isolées étaient les premières visées par les programmes d’amélioration. Or, constater qu’un quartier urbain comme les Planteurs – et son voisin Ras El Aïn – présente des conditions similaires à celles des régions rurales, représente une anomalie grave. Comment expliquer qu’au cœur d’Oran, des citoyens vivent encore dans des conditions jugées acceptables seulement dans les zones éloignées? Les Planteurs ne sont pas un quartier comme les autres : c’est un fragment authentique de la mémoire oranaise. Laisser ce lieu se dégrader, comme Ras El Aïn, c’est menacer un patrimoine social, architectural et historique. La population le sait et s’inquiète de voir son environnement se détériorer au fil des années. Entre directives nationales et réalité locale, l’écart n’a jamais été aussi grand. Oran doit assumer sa responsabilité envers ses quartiers anciens, encore plus envers ceux qui portent l’histoire de la ville. Depuis la prise de fonction de M.Ouchene comme wali d’Oran, les perspectives s’éclaircissent et les habitants peuvent envisager des changements tangibles dans leur quotidien.


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