Nicolas Sarkozy, ancien président de la République française, est désormais auréolé d’un triste record : celui d’être le premier chef d’État de la Ve République, condamné à une lourde peine de prison ferme. Cinq années dont trois incompressibles, viennent sceller le parcours d’un homme qui se rêvait éternel dans l’arène politique et qui finit rattrapé par ses propres dérives. L’histoire retiendra moins ses discours enflammés et ses promesses de rupture que cette image implacable d’un président devenu justiciable, réduit à plaider face à des juges qu’il accusait de «complot». Derrière le vernis d’un chef d’État énergique, pressé et volontariste, se cachait un système de compromissions et de manœuvres obscures. Sarkozy n’était pas seulement l’homme du pouvoir; il était aussi celui des connivences, des réseaux et des caisses noires. La justice française a fini par déchirer le voile de l’ancien locataire de l’Élysée: non pas simplement un acteur politique, mais bien un « malfaiteur associé», impliqué dans une mécanique de corruption et de financement occulte. Le verdict est lourd, mais il est à la hauteur de la gravité des faits: trahison de la confiance publique, mépris de l’éthique et instrumentalisation des institutions. Cette condamnation ne concerne pas seulement Sarkozy. Elle résonne comme une gifle pour une partie de la classe politique française, trop longtemps tentée de croire à l’impunité. Les soutiens de l’ancien président crient au « complot judiciaire », mais les preuves sont là, solides, irréfutables. Ce qui est jugé, au fond, ce n’est pas seulement un homme, mais un système où l’argent et l’influence se mêlent à la politique dans un ballet opaque. La France qui aime tant donner des leçons de morale et de démocratie au monde, se retrouve confrontée à ses propres démons: corruption, favoritisme, collusion entre élites économiques et politiques. La condamnation de Sarkozy rappelle brutalement que même les plus puissants ne peuvent échapper éternellement à la justice. Elle marque aussi, peut-être, le début d’une ère où les citoyens n’acceptent plus de voir leurs dirigeants transformer l’État en entreprise privée, au service d’intérêts inavouables. La justice française a établi donc que sa campagne présidentielle de 2007 avait été alimentée par des fonds occultes venus du régime de Mouammar Kadhafi, transférés par des circuits opaques et des intermédiaires. Cette affaire est assombrie par une série de disparitions troublantes. Shukri Ghanem, ancien ministre du Pétrole libyen dont les carnets mentionnaient des versements suspects au profit de Sarkozy, a été retrouvé noyé dans le Danube à Vienne en 2012. Plus récemment, Ziad Takieddine, l’intermédiaire franco-libanais qui affirmait avoir livré des valises d’argent à Paris, est mort subitement à Beyrouth, à la veille du verdict. Deux témoins majeurs, capables de confirmer la version libyenne, ont donc disparu dans des circonstances suspectes, renforçant le parfum de manipulation autour du dossier. Mais le scandale dépasse la seule question du financement occulte. Sarkozy porte aussi une lourde responsabilité dans le « Printemps arabe», et plus particulièrement dans le chaos libyen. En 2011, il fut l’un des principaux artisans de l’intervention militaire de l’OTAN contre le régime de Kadhafi. Ce choix, officiellement motivé par la défense des civils, avait en réalité une dimension personnelle: faire disparaître un dictateur devenu trop encombrant qui menaçait de dévoiler les secrets du financement de la campagne de 2007. La mort brutale de Kadhafi, lynché dans le désert de Syrte, porte ainsi l’ombre de Sarkozy, soucieux d’effacer une preuve vivante de sa compromission. Le renversement du régime libyen a plongé le pays dans une guerre civile durable, alimenté les réseaux djihadistes et déstabilisé toute la région du Sahel. De ce point de vue, l’action de Sarkozy ne s’arrête pas à une affaire de corruption électorale: elle s’inscrit dans une logique plus vaste, où l’ambition personnelle et la manipulation politique ont contribué à redessiner dans la douleur la carte du monde arabe. Ainsi, le verdict du tribunal ne juge pas seulement un ancien président pour ses turpitudes financières. Il rappelle que Sarkozy fut à la fois le bénéficiaire d’une dictature et l’artisan de sa destruction, laissant derrière lui un champ de ruines. La condamnation du «malfaiteur associé» symbolise un système où cynisme, corruption et soif de pouvoir ont durablement marqué l’histoire récente de la France.
Nicolas Sarkozy, condamné à cinq ans de prison. Un président français en prison
- par Hocine Smaali
- Le 26 Septembre 2025
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