Une autre page sombre et douloureuse de la mémoire nationale est ravivée par les massacres du 8 Mai 1945 en Algérie. La France officielle fait davantage et encore la sourde oreille aux revendications légitimes l’appelant à reconnaître ses responsabilités criminelles. Chaque année, militants de cause, humanitaires et hommes politiques en France, appellent leur pays à courber l’échine devant l’obligation de la mémoire et de l’histoire et se débarrasser de ses réserves et prétextes qui ne lui servent qu’à mener le bateau en rade plutôt que l’accoster à bon port. 80 ans après les terribles massacres perpétrés par l’armée coloniale française dans pas moins de trois villes algériennes, la France de Emmanuel Macron ne reconnaît toujours pas officiellement sa responsabilité, dans le génocide de ses crimes contre l’humanité. Ce qui a conduit plusieurs organisations et associations françaises à un rassemblement inédit à Strasbourg (préfecture du Bas-Rhin) pour commémorer l’anniversaire des massacres du 8 Mai 1945 en Algérie et demander à l'Etat français de reconnaître son rôle dans ces événements sanglants ayant fait au moins 45.000 victimes. Selon des médias français, plus de 120 personnes se sont regroupées à la Place Kléber dont des organisations comme Libre pensée du Bas-Rhin, le Mouvement contre le racisme et pour l'amitié entre les peuples de Strasbourg (MRAP), l'Association des travailleurs maghrébins de France (ATMF), Solidarité pour la Kanaky-Alsace, La France insoumise du Bas-Rhin, le Parti ouvrier indépendant du Bas-Rhin, les Ecologistes Strasbourg et Euro-métropole pour revendiquer que la vérité soit établie et appeler la France à reconnaître ses crimes de guerre commis en Algérie. Plus de 70 députés du Nouveau Front populaire et de La France insoumise ont déposé, lundi dernier à l'Assemblée nationale française, une proposition de résolution visant à reconnaître et condamner les massacres du 8 Mai 1945 à Sétif, Kherrata, Guelma et leurs environs. Le texte appelle en effet à reconnaître officiellement ces massacres comme "un crime d'Etat perpétré contre une population civile désarmée, en contradiction avec les principes universels des Droits de l'Homme".
La commémoration du 80ème anniversaire de ces massacres intervient dans un climat politique tendu entre Alger et Paris d’autant plus que les cabales médiatiques de son ministre de l’Intérieur, Retailleau, fomentées en toutes pièces contre l’Algérie et son peuple, ont participé à la dégradation des relations entre les deux pays malgré les tentatives d’apaisement de leurs deux dirigeants. Les députés demandent également l'inclusion de ces événements dans les manuels scolaires, l'ouverture complète des archives et l'instauration d'une Journée nationale de commémoration. De leur côté, des historiens et chercheurs dont Olivier Le Cour Grandmaison, ont lancé un appel à la reconnaissance de ses crimes coloniaux, soulignant que la répression de 1945, a longtemps été occultée en France. Le collectif note que comparativement à d'autres puissances coloniales comme le Royaume-Uni, l'Allemagne, la Belgique, les Pays-Bas, les Etats-Unis et le Canada, la France est en retard sur la reconnaissance officielle de ces massacres coloniaux. "Reconnaître ces massacres par les plus hautes autorités de l'Etat contribuerait à améliorer les relations entre la France et l'Algérie", estime Olivier Le Cour Grandmaison, dans une déclaration aux médias. Nils Andersson, également membre du collectif, a ajouté qu'il y a "des ressentiments anti-algériens en France, pays colonisateur. Je pense que le rôle des responsables politiques est non pas de faire de la politique politicienne en exacerbant les sentiments identitaires et religieux, mais d'avoir le courage de reconnaître le fait colonial".
En parallèle, l'Institut français de l'audiovisuel (INA) a publié sur son site un article qualifiant l'événement de massacre "oublié" qui "a longtemps été passé sous silence". Selon cette institution française, chargée d'archiver les productions audiovisuelles, les rares images du massacre n'ont été diffusées en France qu'en 2005, "Les Actualités françaises (société française diffusant dans les salles de cinéma un résumé des informations filmées) n'ayant pas couvert une répression sanglante que les autorités françaises faisaient tout pour cacher ou minimiser". Plusieurs médias, en France et à l'international, ont également couvert cet anniversaire, marquant les événements du 8 Mai 1945 comme une date marquante de la lutte pour l’indépendance algérienne.
Crimes coloniaux. Des organisations françaises appellent à la reconnaissance
- par B. Habib
- Le 09 Mai 2025
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