Printemps berbère du 20 Avril 1980. Bejaïa à l’heure de la commémoration

Quarante-cinq ans après les événements historiques du 20 avril 1980, la Kabylie rend une nouvelle fois hommage aux pionniers du Printemps berbère. Comme chaque année, la région vit au rythme de la commémoration de cet événement qui a marqué l’histoire de l’Algérie indépendante. Plusieurs régions abritent ainsi depuis hier une série d’activités culturelles, scientifiques et sportives organisées par les comités de villages, associations, établissements scolaires et maisons de jeunes à travers les wilayas de Tizi-Ouzou, Béjaïa et Bouira. Expositions d’objets artisanaux, bijoux traditionnels, habits ancestraux, tapisseries et spécialités culinaires berbères rappellent la richesse d’un patrimoine immémorial. Des conférences sont également au menu pour retracer les fondements et les enjeux du Printemps berbère, animées par des figures historiques du mouvement ainsi que des chercheurs spécialisés. Depuis 1980, le combat pour la reconnaissance de l’identité amazighe a connu des avancées significatives. L’officialisation de Yennayer comme jour férié national et la reconnaissance constitutionnelle de tamazight comme langue nationale en 2002, puis comme langue officielle en 2016, marquent des tournants majeurs dans l’histoire de ce combat. «Tamazight a parcouru un chemin historique, passant d’un tabou à un élément central de l’identité nationale», souligne un militant culturel. Un avis partagé par nombre d’intervenants, qui voient dans ces acquis les fruits de décennies de lutte et de sacrifices. Cependant, tous s’accordent à dire que le travail est loin d’être achevé. L’enseignement de tamazight à l’école reste confronté à plusieurs défis. Un enseignant du primaire confie : «L’enseignement repose encore sur les travaux de Mouloud Mammeri, sans réel encadrement didactique ni formation suffisante des formateurs». Les manuels scolaires sont jugés inadaptés, et l’harmonisation linguistique fait toujours débat, notamment sur la question de la transcription. Dans ce contexte, plusieurs voix appellent à redynamiser des institutions clés comme l’Académie algérienne de la langue amazighe ou le CNPLET (Centre National Pédagogique et Linguistique pour l’Enseignement de Tamazight). Leur rôle est jugé crucial pour coordonner les efforts de codification, de standardisation et de développement d’une langue plurielle dans un environnement multilingue. La reconnaissance de tamazight dépasse le cadre culturel : elle participe à la réconciliation du peuple algérien avec ses racines. «L’officialisation de Yennayer et de la langue amazigh est un pas vers la stabilité nationale, un gage d’unité dans la diversité», estiment plusieurs acteurs de la société civile. Le Printemps berbère de 1980, enraciné dans les idéaux de Novembre 1954 et de la plateforme de la Soummam, reste un marqueur fort de la quête démocratique en Algérie. «Le 20 avril est plus qu’un souvenir, c’est l’écho fondateur d’une Algérie plurielle, inclusive et en paix avec son histoire», conclut un universitaire. Quarante-cinq ans plus tard, l’esprit du Printemps berbère demeure vivant, ses artisans d’hier appellent les nouvelles générations à œuvrer pour l’unité nationale dont l’identité amazigh est son socle éternel.  


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