ADE de Sidi Bel Abbès. 100 milliards de créances impayées

La gestion de l'eau potable dans la wilaya de Sidi Bel Abbès est confrontée à une équation complexe où l'impératif de service public se heurte à une réalité financière de plus en plus précaire. L'unité locale de l'Algérienne des Eaux (ADE) tire la sonnette d'alarme face à l'envolée de ses créances, un passif client qui menace l'équilibre structurel de l'entreprise et, par extension, la continuité de l'alimentation en eau de la population. Le directeur de l'unité a révélé que le cumul des créances impayées par les clients a franchi le cap symbolique des 100 milliards de centimes (soit 1 milliard de dinars algériens). Cette accumulation de dettes affecte directement le rendement financier de l'ADE et exacerbe ses propres engagements : l'entreprise affiche désormais plus de 400 milliards 700 millions de centimes de dettes auprès de diverses entreprises publiques. Malgré des démarches amiables répétées, le recouvrement de ces sommes est resté largement inopérant. L'inertie du règlement des factures par les 165 746 clients dont 158 154 clients ordinaires, mais aussi 2 234 administrations et 5 131 clients commerciaux met en péril la capacité d'investissement et d'exploitation de l'ADE. L'analyse des coûts de l'eau révèle une distorsion économique majeure et structurelle. Le prix moyen de vente au mètre cube est fixé à 15,21 dinars, alors que le coût réel de production s'élève à 68,96 dinars par mètre cube. Cet écart significatif met en lumière l'ampleur de la subvention publique accordée à cette ressource vitale, mais souligne également la nécessité impérieuse de rationaliser sa consommation et d'assurer le retour sur investissement minimal via le recouvrement des créances. Le directeur insiste sur la prise de conscience citoyenne et administrative.
Le non-paiement des factures n'est pas seulement une perte comptable ; il se traduit directement par l'impossibilité pour l'ADE de réaliser des projets de développement et de modernisation de son réseau, d'améliorer la qualité de son service et réduire le déficit d'alimentation et d'assurer sa propre pérennité au bénéfice des consommateurs. L'ultime recours à la voie judiciaire, bien que possible, est présenté comme l'option que les responsables souhaitent éviter, privilégiant la responsabilité collective et le respect des engagements contractuels. L'unité de Sidi Bel Abbès gère actuellement l'alimentation de 45 des 52 communes de la wilaya, nécessitant l'exploitation d'un réseau hydraulique s'étendant sur 2 634 kilomètres. La logistique est lourde, mobilisant 52 forages, 6 sources, 161 réservoirs, 62 stations de pompage et 2 stations de traitement. Cependant, la demande excède significativement l’offre : pour des besoins quotidiens évalués à 162 000 mètres cubes, la production journalière totale n'atteint qu'environ 102 000 mètres cubes. Ce déficit de 60 000 mètres cubes impacte directement le programme de distribution, avec 90 % de la population alimentée une fois tous les quatre jours ou moins. Face à cette tension sur la ressource, la question de la qualité demeure une priorité. L'unité s'est récemment dotée de deux laboratoires mobiles, venant renforcer le laboratoire régional, afin d'intensifier le contrôle de la qualité de l'eau distribuée et de garantir la protection sanitaire des 727 029 habitants desservis. La résolution de l'énigme des 100 milliards de centimes impayés ne relève pas d'une simple opération de recouvrement, mais d'une prise de conscience sociétale de la valeur réelle de la ressource. Le redressement financier de l'ADE est la condition sine qua non pour investir dans le réseau et combler le déficit d'alimentation, assurant ainsi la sécurité hydrique et la pérennité du service pour les générations futures. L'eau, ressource vitale par excellence, exige une gestion rigoureuse et un engagement citoyen renouvelé.


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