La difficile reconstruction de l’Etat central en Libye

Il a fallu près de 600 brigades des diverses formations paramilitaires appartenant au ministère libyen de l’Intérieur, pour reprendre le contrôle du poste frontalier de Ras-Jedir sur les frontières libyo-tunisiennes, sans l’effusion de la moindre goutte de sang. 
 

Pour réunir cette force, le ministre libyen de l’Intérieur, Imed Trabelsi, a dû recourir aux 13 diverses sections actives de son ministère, afin qu’elles mettent toutes leurs mains à la pâte, d’un côté. De l’autre, il fallait alléger chaque force d’une partie de ses unités, pour qu’elle puisse remplir ses missions fondamentales. Trabelsi a ainsi tenu sa promesse de remettre la main, coûte-que-coûte, sur le poste frontalier de Ras-Jedir, annoncée dimanche 24 mars, lorsqu’il avait décidé la fermeture des frontières. Le ministre n’a pas écarté le recours à la force, avant de recourir plutôt à la dissuasion. Le gouvernement Dbeiba a ainsi mis six jours pour réunir la force nécessaire pour contrôler le principal passage frontalier entre la Libye et la Tunisie, ainsi que tous les autres points de passage, et ce, dans le cadre de l’imposition de l’autorité de l’Etat libyen sur tout le territoire et la lutte contre le trafic de carburant, très fleurissant sur ces frontières. Et ce fut le ministre Trabelsi, qui avait donné l’ordre de mobilisation dimanche dernier, 24 mars 2024, à ses diverses unités pour réunir une large force, sans préciser la mission ni les attributions. Du côté de l’armée, ce fut le général Nemrouch, le second du chef d’état-major qui a mobilisé sept régiments pour une mission parallèle de contrôle des frontières. Toutefois, et en lien avec la tension survenue le 18 mars au poste frontalier de Ras-Jedir, qui a entraîné le retrait de l’unité d’exécution des lois, venant de Tripoli et relevant du ministère libyen de l’Intérieur, ainsi que la fermeture du passage frontalier, la raison de ce déploiement est la remise de l’ordre dans la zone, comme l’a confirmé le chef du gouvernement d’unité nationale, Abdelhamid Dbeiba lorsqu’il a reçu le général Nemrouch. «L’objectif fondamental de la mission, c’est le rétablissement de l’ordre au poste frontalier de Ras-Jedir, loin de tout tiraillement politique ou tribal», a insisté Dbeiba.
Dessous
Avec cet objet de mission et vu que le poste frontalier était contrôlé par des unités armées relevant de l’autorité de la municipalité de Zouara, il avait fallu occuper le terrain par une grande force de dissuasion, qui empêche les milices locales de réfléchir à une quelconque riposte ou perturbation comme celle observée dans la semaine du 18 au 24 mars, eu égard le déséquilibre très remarquable des forces, selon le politologue libyen, Ezzeddine Aguil. Les forces régulières libyennes ont pris place sur les ronds-points stratégiques le long d’une soixantaine de kilomètres à partir de Ras-Jedir et sur l’axe Abou Kamech, Zliten et El Assa, menant aux frontières. 

Une véritable démonstration de force, de près de 600 brigades, empêchant la moindre réaction. Abdelhamid Dbeiba a, par ailleurs, demandé aux conseils municipaux et aux notables tribaux de la région de «soutenir l’Etat dans l’établissement de son autorité a sur tous les postes frontaliers, sans exception». En optant à ce choix de démonstration de force de la part de Tripoli, les unités armées locales de Zouara et de Jmil, habituées à se déployer dans la région, n’auraient que le choix d’éviter la confrontation face aux forces régulières vu le déséquilibre flagrant des forces et du potentiel de feu, sans parler des drones turcs de la base d’El Watya, à une centaine de kilomètres vers le Sud-Ouest, comme ce fut le cas en mai 2023 contre les milices de Zaouia, à une cinquantaine de kilomètres de Tripoli vers la Tunisie, explique à El Watan le juge libyen Jamel Bennour .


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