Dix ans après le soulèvement au Yémen, qui a chassé du pouvoir l’ancien président Ali Abdallah Saleh, dans la foulée du Printemps arabe, le pays est le théâtre d’une guerre dévastatrice et de la pire tragédie humanitaire au monde. Retour sur l’histoire d’un « rendez-vous politique manqué. » Le Yémen continue de sombrer en silence, alors que le pays marque, mercredi 27 janvier, les dix ans du début d’une contestation lancée dans le sillage des soulèvements dits du « Printemps arabe ».
Née le 27 janvier 2011, cette espérance de changement avait vu se mobiliser, pendant plusieurs mois, des dizaines de milliers de manifestants, avant de déboucher, en 2012, sur le départ du président Ali Abdallah Saleh, alors au pouvoir depuis 1978. Malgré cette victoire du peuple, l’espoir restera au stade de promesse. Car le pays le plus pauvre de la péninsule arabique s’est depuis embourbé dans d’interminables crises politiques et une guerre dévastatrice aux lourdes conséquences humanitaires sur le Yémen.
« L’échec du soulèvement yéménite était, hélas, prévisible, tant ce pays est miné par les divisions qui s’illustrent par l’absence de consolidation de l’unité nationale entre le Nord et le Sud, les multiplications d’appartenances entretenues par le facteur tribal, très présent, et les rivalités régionales autour du Yémen », explique à France 24 le politologue spécialiste du Moyen-Orient, Khattar Abou Diab. Toujours est-il qu’à l’époque, la contestation pacifique contre le régime autoritaire du président Saleh, accusé de corruption et de népotisme, commence à l’initiative d’étudiants et de composantes de la société civile, l’une des plus dynamiques de la région. L’Université de Sanaa devient l’épicentre de la contestation qui s’étend, depuis la capitale, à la ville de Taëz, et surtout à Aden, grand port du sud du pays. En quelques semaines, les jeunes protestataires sont rejoints par d’importantes tribus, puis par des mouvements d’opposition et des officiers de l’armée. Selon Maged al-Madhaji, directeur du Sana’a Center for Strategic Studies, interrogé par l’AFP, la contestation s’explique par « les fractures de cinquante ans de sous-représentation politique, d’inégalités sociales, de pauvreté et de corruption, en plus des luttes identitaires ».
