Excepté l’eau et l’électricité, le village manque de tout. Tizi n’a bénéficié, en effet, que des miettes de l’argent du pétrole qui coule à flots dans la wilaya de Tlemcen. Aucun projet d’envergure n’est venu améliorer le quotidien des villageois durant au moins ces dernières années… Si, puisque l’on a procédé dernièrement à l’aménagement du stade du village en tuf. Comme s’il ne manquait que cela. Mais que peut bien faire un stade, ou plutôt une aire de jeu, pour un village qui traîne dans la boue et les égouts, un village dont les ordures jonchent les ruelles? Pour les villageois, en fait, cet aménagement n’était que de la poudre aux yeux, car leurs aspirations sont ailleurs. Situé à quelque huit kilomètres du chef-lieu de la commune d’Ain Fezza, en allant de Tlemcen, ce village est considéré comme un véritable village martyr. Il compte une vingtaine de chahids qui se sont sacrifiés pour l’indépendance, à l’image des Benmostefa, Benabdllah et les Gaid, etc… Des anciens maquisards encore en vie, ce village en compte à la pelle. Si Ahmed, Hadj Mohamdi, Djelti … entre autres, se souviennent que le village a été évacué à plusieurs reprises pendant la guerre de libération nationale. “Notre village a été présent pendant toute la guerre”, disent ces valeureux moudjahidine. En somme, rien que pour cela et sa participation qui a été très active pendant la Révolution, Tizi méritait un bien meilleur sort, mais hélas, celui-ci ne voit toujours pas le bout du tunnel. “L’électricité qui nous éclaire aujourd’hui, nous l’avons héritée du temps colonial!” ironise un villageois. Ce dernier, la quarantaine bien consommée, ne se rappelle pas que son village ait bénéficié d’un quelconque projet de développement consistant. “C’est nous, avec nos propres moyens, qui avions installé les réseaux assainissement et l’AEP, c’était vers la fin des années 1983”, estime le même villageois. Voilà donc bien ce qui peut expliquer les éclatements de ces conduites d’assainissement et AEP. Des réseaux, vieux de près d’une trentaine d’années, ne peuvent que “signaler leurs souffrances” un jour. C’est ce qu’elles font d’ailleurs, à tel point que le village se trouve aujourd’hui “gorgé” d’eaux usées. Les ordures nauséabondes sont quasiment inévitables. “J’ai signalé le problème à maintes reprises concernant cet égout mais en vain”, dit un citoyen dont l’habitation est située à proximité d’un égout, à ciel ouvert qui à longueur d’année déborde sur la route. “Cette situation dure depuis plus de deux ans déjà”, dit encore le même citoyen estimant qu’il ne sait plus à quel saint se vouer. En somme, c’est tout le village qui ne sait plus sur quel pied danser devant cette situation. Pour ses habitants, le réseau assainissement doit être refait, idem d’ailleurs pour les réseaux d’adduction d’eau potable qui ne résistent plus à la pression de l’eau du barrage qui alimente le village depuis des années. Poubelles et égouts à ciel ouvert à gogo. L’autre phénomène qui a gâché la vie et la vue des villageois de Tizi, est relatif à toutes ces poubelles et décharges sauvages qui se sont formées çà et là. C’est que le ramassage et la collecte des ordures ménagères ne sont pas assurés au niveau du village. Tout comme d’ailleurs le ramassage scolaire. Les élèves du village Tizi sont dans l’obligation de se prendre en charge eux-mêmes pour rallier les établissements scolaires. Ceux-ci ont trouvé la parade en louant les transporteurs privés. A Tizi, on se débrouille comme on peut. Ainsi, on se débarrasse de ses ordures ménagères en les jetant dehors. Ces différentes décharges qui “décorent” les rues, n’ont pas attiré l’attention des autorités locales, laissant le village à son propre sort, abandonné entre ordures et égouts à ciel ouvert. Jusqu’à quand ? Le village de Tizi ne peut que prendre son mal en patience, lui qui s’est habitué à vivre dans ce triste décor. Un réseau routier défoncé avec un décor orné de routes qui sont encore en état de pistes. Celles-ci sont en effet défoncées, contraignant les automobilistes du village à rouler à pas de tortue, sinon gare à son matériel. “Un village oublié”, c’est l’expression qui sied le plus en fait pour décrire la situation dans laquelle se trouve Tizi et les quelque 800 âmes qui y vivent dont la plupart sont des jeunes. Une jeunesse qui ne dispose que de cette aire de jeu, nouvellement aménagée, pour se distraire. En fait, une maison ou un foyer de jeunes est devenu un luxe pour ce village qui demande d’abord d’être doté du strict minimum qui ne parvient pas à se frayer un chemin dans le village. Un village qui se montre “gentil” malgré tout. Aussi, ce décidément “mal-aimé” de la commune d’Ain Fezza ne sort toujours pas de l’auberge dans d’autres domaines de la vie. Une école est également héritée d’un ex-temps. Une salle de soins reste également un rêve lointain pour les villageois. Pourtant, la bâtisse, qui devait, l’abriter existe. Elle existait déjà depuis une dizaine d’années. Cette bâtisse a été érigée, mais n’a jamais été équipée. Elle est aujourd’hui complètement abandonnée, servant de gîte pour les chiens errants! C’est justement un de ces chiens errants (ironie du sort) qui a fait sortir ce village de son anonymat. C’était, il y a quelques années, lorsque la rage a emporté un citoyen du village. Un village, bien connu dans la région, par sa splendide nature qui l’entoure, cette vitrine constitue l’unique “merveille” qui peut arracher un passager de ses travers en voyant l’état dans lequel se trouve le village. En parlant du café, ceci constitue le seul loisir des jeunes, notamment en hiver, puisque en été, certains trouvent leurs comptes dans l’oued qui passe juste à côté du village et ce, en s’adonnant à la pêche. On aurait peut-être pas tout dit sur les souffrances de ce village, mais cela doit être suffisant pour attirer l’attention des pouvoirs publics pour qu’ils bougent le petit doigt afin d’aider cette population à humer la bonne odeur et la bonne santé. Ou alors il faudrait attendre que les esprits s’échauffent pour daigner enfin répondre aux doléances de ces villageois qui attendent impatiemment de goûter à de beaux jours?
