Par Sahraoui Mohamed
Les Arènes d’Oran, inaugurées en 1910, qui ont plus d’un siècle d’existence, sommeillent dans une longue torpeur qui nous ramène avant l’indépendance où l’influence culturelle hispanique était persistante dans la ville, avec l’arrivée ininterrompue de sujets espagnols, venus se réfugier et s’installer en Algérie à la suite de la guerre civile du temps de Franco qui a endeuillé ce pays, opposant de 1936 à 1939, Républicains et Nationalistes, et même bien avant. Quand on parle Arènes, bien sûr, on parle corridas, ce spectacle tauromachique qui remonte à la moitié du 18ème siècle, opposant le taureau à une multitude d’acteurs qui vont du picador, matador, toréador, sans oublier le personnel d’entretien et de surveillance, les clowns pendant l’entracte et l’orchestre qui ouvre les jeux…. Les Européens d’Oran, surtout d’origine espagnole, éprouvaient un engouement certain à assister, avant l’indépendance, à des corridas où les meilleurs toreros d’Espagne venaient exhiber leur talent, devant un public exalté et ébahi. Mais sous la pression des Associations de protection des animaux en Espagne et en France, des voix se sont élevées, depuis plusieurs années, pour dénoncer la cruauté dans la mise à mort des taureaux, tout en demandant de mettre fin à leur agonie.
Si dans les archipels des Baléares et des Canaries, l’abolition des corridas est effective, dans certaines contrées espagnoles et en France, cette tradition est restée tenace. Aussi, pour déroger à la règle et ne pas commettre, dans le cadre de la tauromachie, un génocide dans l’exécution des taureaux lors des corridas, il serait judicieux de réfléchir à l’utilisation des Arènes d’Oran, dans un cadre festif et ludique, puisque le site vaste, ouvert et aéré, s’avère très approprié pour l’ouverture de disciplines alliant divers sports (lutte, catch, haltérophilie, matchs de handball, basket-ball, volley-ball, boxe, culturisme, jeux de boule, équitation) ainsi que des manifestations culturelles et récréatives tels les comédies, récitals et concerts de chants, radio crochet, danses folkloriques, jeux de cirque et festivités religieuses avec des ensembles de karkabous, diwan et gombri… On peut même recréer dans cet endroit, comme cela se fait dans certains pays d’Europe, notamment en France, au Puy du Fou, en Vendée, toutes sortes de reconstitutions historiques qui ont beaucoup de succès puisque elles drainent des milliers de spectateurs venus assister particulièrement aux combats de gladiateurs avec tenue d’époque, avec bien sûr des armes factices, et dans les tribunes officielles, un César joué par un comédien, assisté d’hôtes, tous en tenues d’apparat de l’époque romaine, le tout accompagné de musique d’époque et de comiques afin de mettre de l’ambiance. Cela donnerait à ce spectacle, une atmosphère de plaisirs de la Rome antique et les 10.000 spectateurs puisque les Arènes peuvent contenir ce nombre, jubileraient devant cet attrait qui sortirait de l’ordinaire d’autant plus qu’il n’y a aucune attraction de cette ampleur qui puisse redonner goût à la vie déjà morne en Algérie et qui puisse attirer autant de monde. Si par le passé, les Arènes ont été le témoin en plus des corridas, de concerts de chants d’artistes internationaux à l’image des Platters, de combats de catchs mettant aux prises les meilleurs catcheurs de l’époque entre autres l’Ange Blanc dont la tête était masquée par une cagoule blanche contre le Bourreau de Béthune également masqué par une cagoule noire, qui affichaient complet lors de leurs multiples exhibitions, Oran pourrait profiter de cette manne providentielle, en remettant au goût du jour ces Arènes qui ont tendance à mourir à petits feux et ce n’est pas la visite de quelques visiteurs algériens, venus par curiosité les contempler, qui va renflouer les caisses. Oran est assise sur un filon d’or que les élus locaux, depuis 1962, n’ont jamais su l’exploiter par manque de mécènes ou d’amoureux de leur ville alors que cette dernière semble sombrer dans une léthargie et un abandon qui ne sont pas prêts de la relever. Ainsi, grâce à cette aubaine, le tourisme à Oran pourrait renaître, sortir de son immobilisme, se relever et profiter à tous les métiers, commerces, restaurants et hôtels etc… et ce, malgré que les élus locaux qui se sont succédé depuis des décennies, n’aient jamais réalisé qu’ils détenaient, dans leur ville, un trésor et n’aient jamais agi pour rehausser son prestige déjà terni par l’amoncellement des ordures et des déchets ménagers dans chaque coin de rue. Dommage pour une ville surnommée El Bahia, connue pour ses plaisirs et ses fastes d’antan, qui sombre dans un désarroi complet mais qui pourrait se remettre si les ministères du Tourisme et de la Culture contribuaient à la renaissance des Arènes d’autant plus que les Jeux Méditerranéens approchent à grand pas.