L’Algérie a célébré, hier, le 61e anniversaire du cessez-le-feu, après une guerre déclenchée le 1er Novembre 1954, par une poignée de révolutionnaires certes, mais résolus, qui après épuisement de tous les moyens antérieurs de lutte et de revendications émancipatrices, avec détermination, avaient bouleversé, par l’action directe, le cours de l’histoire, en s’adressant, en Novembristes, au peuple algérien en ces termes homériques: «A vous qui êtes appelés à nous juger…». La célébration du 61e anniversaire de la fête de la victoire, proclamée au lendemain de la signature des accords d’Evian, marque la fin d’une longue guerre de libération et d’un combat courageux et héroïque des Algériens contre le colonialisme français. Le 19 mars 1962 reste une date importante pour une génération qui n’arrive toujours pas à oublier ce souvenir d’une victoire malgré les sacrifices d’une guerre dure. «Respirer la liberté» après des années du colonialisme était, pour ces gens-là, une seconde vie dans une Algérie qui se prépare pour l’indépendance. L’annonce officielle du cessez-le-feu, conclu le 18 mars à Evian, a été ainsi accueillie avec une immense et incommensurable joie par les moudjahidine des maquis de l’Armée de libération nationale (ALN) et par l`ensemble du peuple algérien qui venait de retrouver sa liberté et sa souveraineté. Dans les villes, on attendait les nouvelles de retrouver justement les combattants vivants et s’enquérir des leurs, un mari et un fils encore vivants. «C’était d’abord des retrouvailles avec nos familles et les gens de nos villages, mais c’était aussi très pénible d’annoncer la mort d’un proche pour quelqu’un qui l’attendait», nous dira un ancien moudjahid qui croise pour la première fois, sans accrochage, les soldats de l’armée française. «Nous les avons croisés; après l’annonce du cessez-le feu, l’un des soldats français disait à ses camarades: «Regarde les fellagas nous ne quittant pas de regards», nous dira encore notre interlocuteur avec émotion, lui qui était au PC de la wilaya III historique, dirigée par les grands de la Révolution Algérienne. Les comités de suivi du cessez-le-feu étaient aussi un autre souvenir pour les moudjahidine de la vallée de la Soummam qui se rappellent de cette difficulté de gérer ce dossier avec les Français qui étaient des forces ennemies.
«C’était au début, un climat de suspicion et puis on est arrivé par la suite à gérer ce dossier, mais ce n’était pas facile avec la présence de harkis qui rôdaient encore dans les parages», nous dit-on de cette date qui marque la victoire. Pour les familles de chouhadas, c’était aussi le début de recherches des leurs; les chercheurs d’os, comme les a surnommés Tahar Dajout, étaient à la recherche des ossements des leurs, les déterrer dans la douleur mais avec émotion et fierté. Les négociations d`Evian qui avaient débuté le 20 mai 1961 et suspendues à plusieurs reprises, ont été marquées par l`obstination de la partie française qui avançait trois propositions, rejetées par la délégation algérienne. Ces propositions concernaient le maintien du Sahara algérien et la base navale de Mers El-Kébir sous domination française et la question du million de Français établis en Algérie. Pour feu Rédha Malek, porte-parole de la délégation du Gouvernement Provisoire de la République Algérienne (GPRA), dirigée alors par Karim Belkacem «avant d’aboutir au paraphe des Accords d`Evian, signés le 18 mars 1962 consacrant l`indépendance du pays, la délégation algérienne avait rejeté tout au long de ces négociations « toutes les propositions présentées par la France hypothéquant la souveraineté nationale après l`indépendance ». «La délégation algérienne avait campé sur sa position au sujet du Sahara qu’elle était déterminée à défendre coûte que coûte, avant de convenir avec la délégation française du maintien des investissements français au Sahara pendant une durée de trois ans, notamment après la découverte de pétrole», c’est ce que tenaient à réaffirmer, à chaque fois, besoin est, les historiens des deux rives de la Méditerranée. «Pour ce qui est du statut des Français d`Algérie après l`indépendance, les deux parties sont parvenues à un accord accordant un délai de trois ans aux Français pour choisir la nationalité algérienne ou de garder leur nationalité française et être traités conformément aux lois qui régissent les étrangers en Algérie», disaient les mêmes spécialistes de la guerre d’Algérie, réfutant du coup le fameux slogan «la valise ou le cercueil».
